L’un des thèmes sur lequel j’ai fait des recherches lorsque j’ai écrit la saga Captive, c’est le féminisme à l’époque communiste. En effet, l’action se déroule en pleine guerre froide entre 1960 et 1980. Quand on pense à cette époque on pense : femme au foyer, pas le droit de vote, pas le droit à l’avortement et mari absent.
Et bien sous le communisme, ce n’était pas tout à fait ça.
1. Le communisme en avance sur son temps ?
Désireux de couper net le cordon avec les idées « hypocrites » et « archaïque » de la bourgeoisie, la femme à tout de suite le droit :
- de voter
- d’avorter
- de travailler
- de divorcer
Une phrase qui m’a marqué dans mes recherches est celle de Khrouchtchev : « Tous ces gadgets ne font qu’enchaîner la femme à la maison »
On est en 1959, il est face à Nixon, à l’exposition américaine. Nixon lui fait l’étalage des dernières innovations en matière d’électroménager. Aux Etats-Unis, c’est le modèle de la femme au foyer qui prime. En France, l’avortement est interdit, le droit de vote a été obtenu en 1944. Donc l’occident est très loin de l’idée de la femme qui travaille. Aurait-on affaire un féministe qui s’ignore ?
En tout cas, les chiffres sont là : en 1975 on compte : 61% des emplois spécialistes ou encore 81% des employées de la santé.
Pour saluer leur travail, le 8 mars, journée de la femme est même férié en Russie.
Parmi les femmes marquantes on note : la première femme à aller dans l’espace : Valentina Terechkova en 1963. La première femme ambassadrice : Alexandra Kollontaï en 1930.
2. Trop beau pour être vrai ?
Dans la réalité des faits, les choses sont beaucoup plus nuancées.
Entre les guerres, les exécutions pour trahison et le goulag, il ne restait plus beaucoup d’hommes en Russie. On compte à peu près le double de la population féminine. Résultat, les femmes étaient à tous les postes. Et une femme qui ne travaillaient pas étaient considérés comme un parasite.
En 1960, devant la baisse de la natalité et le chaos ambiant de la société (à priori, la liberté sexuelle féminine, ça ne plaît pas), on remet l’interdiction à l’avortement et Staline replace au centre de la société le model de la famille. La femme doit être mère. Mais celle-ci doit toujours travailler. A savoir qu’en URSS les femmes ont droit à 3 ans de congé maternité pour cela. Ce qui d’ailleurs posera problème à la chute du communisme. Donc elles sont plus que fortement encouragé à avoir des enfants (la société est conçu en ce sens) mais à aussi s’occuper d’eux en rentrant.
Bref, ils étaient en avance sur le modèle de la femme moderne.
De plus, si elles battent tous les scores en termes de représentations, elles sont souvent bien moins payés (jusqu’à 30% de moins) et n’occupent que rarement des postes à responsabilités.
Les mots « burn-out » et charge mentale n’existaient pas encore mais on n’en était pas loin.
3. La contradiction du féminisme russe
J’ai été choquée autant qu’agréablement surprise lors de mes recherches. Il y avait de bonne base, on partait bien. Et puis en chemin tout s’est perdue. Aujourd’hui, la situation est compliquée. Certes les femmes peuvent faire tous les métiers ou presque (il y a 455 métiers interdites aux femmes en Russie pour « protéger leur santé reproductive » et leur « sécurité »).
La violence domestique est un vrai problème là-bas. Sauf qu’elle a été dépénalisé en 2017 et que les victimes sont considérées comme coupable (le fameux : elle l’a bien cherché).
Rien n’est tout blanc ou tout noir.
Il y a évidemment beaucoup de chose encore à dire. Je n’ai fait là qu’un grossier résumé.
Pour plus de détails, vous pouvez consulter mes sources :
Livre : Les mouvements féminins en Russie de Évelyne Enderlein maître de conférences à l’Université Marc Bloch à Strasbourg spécialiste de civilisation russe et soviétique
Deux points de vue par deux femmes russes sur le féminisme en Russie aujourd’hui recueilli par RBTH :
La Russie a besoin de féminisme
La Russie n’a plus besoin de féminisme
Le très célèbre kitchen debate vu par le Times
Un article ambigue avec le point de vue de l’époque du journaliste André Pierre pour Le Monde
Si vous êtes à l’aise en anglais la thèse : « Soviet People with Female Bodies : Performing Beauty and Maternity in Soviet Russia in the mid 1930-1960s » de Yulia Gradskova
Quel genre de personnage féminin aimeriez-vous lire ou voir ?